D’abord il y a la mer

D’abord il y a la mer.

Devant nous, un bandeau turquoise laisse la place à une masse bleu foncé tachetée de quelques îlots sauvages à l’horizon. Cette étendue d’eau est omniprésente, du nord au sud et du levant au couchant. Nul ne peut la feindre. Elle étreint, comme une mère pour ses enfants, les sept mille six cent quarante et une îles que comptent l’archipel des Philippines. Et puis, il y a le bruit des vagues qui s’écrasent lourdement sur la plage corallienne.

Tel des araignées d’eau, les Bankas traditionnelles (trimarans philippins) fendent la houle avec une certaine fragilité. Alors que le stabilisateur latéral en bambou enfourne violemment une vague et projette des embruns sur le cockpit, l’étrave du bateau fend une lame et forme ainsi une écume blanchâtre autour de la coque où l’on distingue l’écriteau « God is Love ». De part et d’autre, les abat-jours industriels qui équipe le bateau pour la pêche de nuit lui confèrent encore un peu plus des airs de crustacé.

Ensuite il y a la vie.

Celle des créatures mystérieuses et fantastiques qui peuplent ces fonds marins. Nous explorons pendant de longues heures cet écosystème, avec émerveillement, mais sans toutefois le comprendre vraiment. Les forets de coraux multicolores et protéiformes suggèrent des motifs connus : ceux de pins parasols, de bois de cervidés, d’arbres morts, de champignons. Au milieu d’eux, erre un poisson trop maquillé, aux allures de travesti neurasthénique. Il retourne péniblement avec ses dents de lourdes roches et des morceaux de coraux morts, peut-être à la recherche de trésors enfouis.

Un peu plus loin, ce qui ressemble à des thons, chassent de petits poissons. Au gré des attaques des chasseurs, les bancs se forment et se dispersent dans une chorégraphie précise qui rappelle celle des essaims d’abeilles et des vols d’étourneaux. Sur notre passage, les lèvres bleutées des bénitiers se rétractent et les poissons multicolores se cachent avec empressement dans les sous-terrains imbriqués que forment les bases des coraux.

À proximité de la plage, tel des robots aspirateur, les raies à tâches bleues filtrent le sable à la recherche de leur repas pendant que les tortues broutent les algues qui jonchent les fonds sablonneux avant de s’envoler vers la surface pour reprendre leur respiration. Puis notre rythme cardiaque augmente lorsque l’on croise un tricot rayé, dangereux serpent amphibie qui se déploie de toute sa longueur à quelques mètres sous nous.

Notre gilet de stabilisation se déleste encore des quelques bulles d’air qui réduisent notre flottabilité et nous permettent de descendre un peu plus vers cette étoile de mer au bleu intense. Nous sommes à quatorze mètres sous le niveau de la mer et la température de l’eau est de 28°C en surface.

Nous plongeons depuis la plage de la petite île tropicale de Pandan (12.85663, 120.7541). Elle accueille de modestes bungalows en bambou dans lesquels nous passerons trois jours innocents, où s’alterneront les phases de snorkeling, plongée, lecture dans un hamac à l’ombre des cocotiers et apéros au coucher du soleil. En somme, ces quinze jours aux Philippines auront été pour nous des vacances dans les vacances.

2 commentaires sur “D’abord il y a la mer

  1. bonjour les robinson…vos images font vraiment rêver…nous qui sommes sous la pluie depuis décembre.! on vous embrasse très fort et pensons souvent à vous, Clothilde et OMA

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