Odyssée Péruvienne

Le Pérou était d’emblée l’un de nos coups de cœur. Dès les premiers jours, nous avons été séduits par la beauté sauvage de ses paysages, l’authenticité et la bienveillance de ses habitants. Et les quinze jours passés dans la région de Cusco furent par leur intensité, la confirmation du caractère spécial de cette partie du monde.

Bien sûr, il y a l’incontournable Machu Picchu qui attire les foules du monde entier. Ce nom est tellement évocateur qu’il agit comme un aimant, à l’attractivité telle, que nous n’avons pas pu y résister. Pour rejoindre la cité perdue sans trop avoir à souffrir de la saturation touristique, nous avons fait le choix de nous y rendre par des chemins moins prisés des masses. Nous avons ainsi opté pour un magnifique trek de 5 jours en autonomie dans les montagnes enneigées du Salkantay. Après avoir loué tente et matériel technique, nous nous sommes mis en marche.

La première nuit, nous décidons de bivouaquer à 4000 mètres d’altitude, le long d’un petit ruisseau qui nous fournirait le ravitaillement en eau. Le lieu est paisible et la vue est à couper le souffle. Nous n’avons pour seuls voisins que quelques chevaux et lamas qui broutent sans guère nous prêter d’attention.

Mais alors que nous venons de monter la tente, un vent du sud-ouest se lève et en quelques minutes emporte avec lui de gros nuages noirs. Les pics enneigés du Salkantay disparaissent en un battement de cil. Un orage arrive droit sur nous. Nous décidons de prendre notre réchaud à gaz et nos provisions et descendons dans la vallée pour rejoindre un abris à bétail que nous avions repéré deux kilomètres plus bas. Sur le chemin, la pluie vient battre nos joues endolories par le froid. À peine arrivés sous l’abri, le vent durci et l’orage se déchaîne. À l’écho du tonnerre dans la vallée, s’ajoutent rapidement les fracas assourdissants de la grêle et des rafales de vent qui font violemment claquer les taules de l’abris. Les grêlons rebondissent au sol et s’amassent autour de nous formant une pellicule blanche. Nous récupérons une taule ondulée qui s’est détachée de l’abris et la plions de manière à protéger la flamme de notre réchaud du vent latéral. Malgré cela, l’eau peine à bouillir. La nuit tombe et la pluie ne s’arrête pas. Nous finissons par manger cette soupe lyophilisée tiède au milieu de la boue et des bouses de vache sèches.

Lorsque la pluie faiblit enfin, nous décidons de retourner à notre campement. La tente n’a pas résisté à l’eau et le sol en est imbibé. Nous disposons heureusement d’une bâche en plastique que nous déployons pour nous isoler du sol.

Au petit matin, lorsque le réveil sonne, nos yeux sont déjà ouverts. Recroquevillé en position fœtale, nous n’avons pas trouvé le sommeil, luttant toute la nuit contre le froid. Les sacs de couchage que nous avions loué, pour une température allant jusqu’à -15°C, se sont avérés trop légers et le soutien de la couverture de survie n’a pas été suffisant. Le double toit de la tente est recouvert d’un centimètre de glace.

À ce moment précis de l’histoire, nous avons hésité à abandonner. Hors de question pour notre sécurité de passer une nouvelle nuit en altitude avec cet équipement.

Mais le retour du soleil et la beauté de la montagne nous redonnent du baume au cœur. Nous prenons la décision de marcher d’avantage que prévu aujourd’hui et ainsi de redescendre à une altitude qui serait moins froide. Ce nouvel itinéraire nous a imposé une journée de 9 heures de marche. Nous sommes épuisés mais gratifiés par la noblesse des paysages. Le passage du col enneigé à 4600 mètres en est l’apogée. Lors de notre décente, les paysages changent complètement pour laisser place à une forêt tropicale. Nous sommes d’ailleurs vigoureusement attaqués par les mouches des sables que l’anti-moustique laisse indifférent.

Trois jours plus tard, nous sommes rejoins par nos amis tourdumondistes : Christilla et Albéric. Nous les avions précédemment croisés au Laos, au Vietnam et aux Philippines. Nous finissons ensemble les dernières heures de marche qui nous séparent du Machu Picchu. Nous choisissons de visiter le site le lendemain après-midi, lorsque l’affluence sera la moins importante. Cela nous laisse du temps pour partager nos derniers récits de voyages autour d’un Pisco Sour bien frappé.

Au lendemain, le site s’offre à nous. Plus majestueux encore que nous l’avions imaginé. Des montagnes en pains de sucre encerclent la citée Inca. Une lumière chaude enrobe les ruines. Des lamas se promènent en liberté sur les pelouses. Quelle puissance dégage ce lieu !

De retour à Cusco, nous décidons de louer des motos pour quelques jours afin de découvrir la « Vallée Sacrée » et ses environs. Les Honda XR 250 Tornado que nous trouvons sont dans un état d’usure avancé, mais nous en obtenons un bon prix.

Notre GPS nous guide loins des routes bitumées. Nous coupons à travers champs, empruntons des chemins de randonnées escarpés, nous perdons en offroad pour notre plus grand bonheur. Nous nous laissons à nouveau surprendre par la diversité et l’élégance des décors : salines de Maras, improbables source d’eau saturée en sel, steppe aride de l’Altiplano et ses bergers, ruines Incas à flanc de montagne.

Les villages pittoresques que nous croisons fêtent leur Saint Patron. Pour l’occasion, il y a un grand carnaval mêlant processions religieuses et rites païens pré-hispaniques. Chacun se déguise et fait la fête pendant une semaine.

Nous sommes les seuls touristes et nous faisons accueillir chaleureusement. Les enfants nous invitent à danser. Les hommes nous offrent des bières et nous faisons la fête ensemble. Le Pérou nous charme une nouvelle fois et nous nous laissons simplement envouter.

2 commentaires sur “Odyssée Péruvienne

  1. « C’est super ! C’est beau ! » s’exclame Roby … Quant à moi, j’ajouterai que même vos mésaventures nous font rêver et que nous aimons toujours autant vous lire et regarder les photos. Bisous à vous !
    Roby et Valérie

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